Spiral et Cloutier rouge
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Spiral et Cloutier rouge
Saviez-vous chers amis que ce n'est qu'au début de 1956 que fut produite la première montre 100 % soviétique ?
Jusqu'à cette date, l'URSS produisait toutes les pièces nécessaires à l'industrie horlogère sauf une : le spiral.
Un spiral de Raketa (photo Padre)
Ce petit ressort enroulé en spirale qui, ramenant le balancier à sa position de départ à la fin de chaque alternance, règle le fonctionnement d'une montre mécanique, est la pièce la plus délicate à produire. Toute variation du moment de flexion à l'une des extrémités doit être intégralement transmise à l'autre extrémité. Or un ruban d'acier tend naturellement, s'il était droit au départ, à se disposer sous la forme d'un rouleau dont les spires se touchent, provoquant un frottement influant sur le comportement. L'obtention de spires non jointives (et équidistantes!) nécessite dès avant l'enroulement une conformation particulière, en "S", du ruban d'acier. C'est cette délicate mise en forme du ressort en "S" qui demande beaucoup de savoir-faire et d'expérience.
En haut : le spiral sous tension, en bas, le spiral lorsqu'il n'est pas sous tension, tel qu'il le faut produire (image: Fondation de la haute horlogerie).
Jusqu'à fin 1955, les spirals des montres soviétiques étaient presque tous fournis par le premier producteur mondial: la société suédoise Sandvik, dont voici l'histoire. En 1857, un industriel suédois, Göran Fredrik Göransson, se rend au Royaume-Uni pour se procurer une machine à vapeur pour le haut-fourneau de Edske. Il y découvre l'invention de Bessemer (déposée en 1855), change ses plan, acquiert un cinquième du brevet Bessemer et retourne en Suède y appliquer la technique. En 1858, le premier acier suédois issu du procédé Bessemer est produit à Edske. C'est le point de départ d'une grand réussite industrielle. C'est cependant dans un revers de fortune qu'elle est partiellement revendue, restructurée et rebaptisée Sandvikens Jernverks AB (Fabrications métallurgiques de Sandviken SA). La marque Sandvik est alors retenue pour les produits d'acier.
C'est en 1876 que sandviken développe la production de fils, de rubans et de ressorts métalliques de précision pour l'industrie horlogère. Cette production reste au début marginale, dans l'ombre de celle des... baleines de parapluie et de corset !
En 1904, la société ouvre une filiale en Suisse pour bénéficier des recherches des manufactures horlogères locales. En 1909, suite à la grande grève des ouvriers suédois, la société ouvre une filiale en Allemagne (sa première filiale de production) spécialisée dans les lames de rasoir. L'entreprise profitera considérablement de la première guerre mondiale mais souffrira de la grande crise : en 1921, elle enregistre sa première perte depuis 1868 ! Passé la crise, l'entreprise continuera de se développer, se spécialisant dans les équipements industriels, pour être aujourd'hui encore 47.000 travailleurs dans 130 pays.
Production d'acier à Sandviken (photo: wiki)
C'est donc en 1956 seulement que les techniciens de la fabrique Красный гвоздильщик (Le Cloutier Rouge) réussirent à produire de bons ressorts de qualité, libérant ainsi les usines de montres soviétiques de le dépendance envers le monopole suédois.
Cette usine est située au sud-ouest de l'île Vassilievski, dans une des plus anciennes zone industrielle de Saint-Petersbourg. C'est là qu'étaient installées les teintureries, tanneries et autres fabriques polluantes et nauséabondes qui étaient interdites dans le centre ville et dans la partie supérieure de la Neva. C'est une négociant en fer et en bronze, le français F. A. Chopin, qui a fondé en 1857 une fabrique métallurgique qui allait changer plusieurs fois de propriétaire et de raison sociale. En 1921, l'usine (dotée d'un laminoir) a été rebaptisé "Le Cloutier rouge". Elle connu une développement constant sous le pouvoir soviétique, particulièrement lors du premier plan quinquennal.
Parmi ses nouveaux bâtiments, le plus notable était la fabrique de câble et surtout le château d'eau, conçu par architecte Yakov Chernikhov (1889-1951), un diplômé de l'Académie des Arts de Saint-Pétersbourg. Le château d'eau est un exemple frappant de l'architecture constructiviste. La conception de la tour combine deux volumes géométriques un tronc élancé prismatique et la cuve cylindrique, s'appuyant sur deux minces piliers. Yakov Chernikhov, qui fut d'abord un futuriste, est l'un des plus éminents représentants du constructivisme soviétique, et un théoriciens majeurs de l'architecture. Ses dessins (environ 17.000! jetez un oeil [url= https://www.google.be/search?q=Yakov+Chernikhov&client=firefox-b&source=lnms&tbm=isch&sa=X&ved=0ahUKEwjC8-aNzOXMAhWDI8AKHahPD34Q_AUIBygB&biw=980&bih=534/url]) sont d'une qualité exceptionnelle. Dans la période tant regrettée par Jacques von Polier ou « tout était possible en Russie » (pourvu qu'on ai de l'argent et/ou des hommes de main), un grand nombre des dessins originaux des Chernikhov ont été volés dans les archives et revendus en occident à des collectionneurs privés...
Dessin de Chernikhov pour l'usine "Le Cloutier rouge"
La production de spiral continue à Saint-Peterbourg, comme vous avez pu le voir dans le reportage que Svoboda a posté ici: https://www.montres-russes.org/t5487-reportage-rts-1-sur-raketa
Jusqu'à cette date, l'URSS produisait toutes les pièces nécessaires à l'industrie horlogère sauf une : le spiral.
Un spiral de Raketa (photo Padre)
Ce petit ressort enroulé en spirale qui, ramenant le balancier à sa position de départ à la fin de chaque alternance, règle le fonctionnement d'une montre mécanique, est la pièce la plus délicate à produire. Toute variation du moment de flexion à l'une des extrémités doit être intégralement transmise à l'autre extrémité. Or un ruban d'acier tend naturellement, s'il était droit au départ, à se disposer sous la forme d'un rouleau dont les spires se touchent, provoquant un frottement influant sur le comportement. L'obtention de spires non jointives (et équidistantes!) nécessite dès avant l'enroulement une conformation particulière, en "S", du ruban d'acier. C'est cette délicate mise en forme du ressort en "S" qui demande beaucoup de savoir-faire et d'expérience.
En haut : le spiral sous tension, en bas, le spiral lorsqu'il n'est pas sous tension, tel qu'il le faut produire (image: Fondation de la haute horlogerie).
Jusqu'à fin 1955, les spirals des montres soviétiques étaient presque tous fournis par le premier producteur mondial: la société suédoise Sandvik, dont voici l'histoire. En 1857, un industriel suédois, Göran Fredrik Göransson, se rend au Royaume-Uni pour se procurer une machine à vapeur pour le haut-fourneau de Edske. Il y découvre l'invention de Bessemer (déposée en 1855), change ses plan, acquiert un cinquième du brevet Bessemer et retourne en Suède y appliquer la technique. En 1858, le premier acier suédois issu du procédé Bessemer est produit à Edske. C'est le point de départ d'une grand réussite industrielle. C'est cependant dans un revers de fortune qu'elle est partiellement revendue, restructurée et rebaptisée Sandvikens Jernverks AB (Fabrications métallurgiques de Sandviken SA). La marque Sandvik est alors retenue pour les produits d'acier.
C'est en 1876 que sandviken développe la production de fils, de rubans et de ressorts métalliques de précision pour l'industrie horlogère. Cette production reste au début marginale, dans l'ombre de celle des... baleines de parapluie et de corset !
En 1904, la société ouvre une filiale en Suisse pour bénéficier des recherches des manufactures horlogères locales. En 1909, suite à la grande grève des ouvriers suédois, la société ouvre une filiale en Allemagne (sa première filiale de production) spécialisée dans les lames de rasoir. L'entreprise profitera considérablement de la première guerre mondiale mais souffrira de la grande crise : en 1921, elle enregistre sa première perte depuis 1868 ! Passé la crise, l'entreprise continuera de se développer, se spécialisant dans les équipements industriels, pour être aujourd'hui encore 47.000 travailleurs dans 130 pays.
Production d'acier à Sandviken (photo: wiki)
C'est donc en 1956 seulement que les techniciens de la fabrique Красный гвоздильщик (Le Cloutier Rouge) réussirent à produire de bons ressorts de qualité, libérant ainsi les usines de montres soviétiques de le dépendance envers le monopole suédois.
Cette usine est située au sud-ouest de l'île Vassilievski, dans une des plus anciennes zone industrielle de Saint-Petersbourg. C'est là qu'étaient installées les teintureries, tanneries et autres fabriques polluantes et nauséabondes qui étaient interdites dans le centre ville et dans la partie supérieure de la Neva. C'est une négociant en fer et en bronze, le français F. A. Chopin, qui a fondé en 1857 une fabrique métallurgique qui allait changer plusieurs fois de propriétaire et de raison sociale. En 1921, l'usine (dotée d'un laminoir) a été rebaptisé "Le Cloutier rouge". Elle connu une développement constant sous le pouvoir soviétique, particulièrement lors du premier plan quinquennal.
Parmi ses nouveaux bâtiments, le plus notable était la fabrique de câble et surtout le château d'eau, conçu par architecte Yakov Chernikhov (1889-1951), un diplômé de l'Académie des Arts de Saint-Pétersbourg. Le château d'eau est un exemple frappant de l'architecture constructiviste. La conception de la tour combine deux volumes géométriques un tronc élancé prismatique et la cuve cylindrique, s'appuyant sur deux minces piliers. Yakov Chernikhov, qui fut d'abord un futuriste, est l'un des plus éminents représentants du constructivisme soviétique, et un théoriciens majeurs de l'architecture. Ses dessins (environ 17.000! jetez un oeil [url= https://www.google.be/search?q=Yakov+Chernikhov&client=firefox-b&source=lnms&tbm=isch&sa=X&ved=0ahUKEwjC8-aNzOXMAhWDI8AKHahPD34Q_AUIBygB&biw=980&bih=534/url]) sont d'une qualité exceptionnelle. Dans la période tant regrettée par Jacques von Polier ou « tout était possible en Russie » (pourvu qu'on ai de l'argent et/ou des hommes de main), un grand nombre des dessins originaux des Chernikhov ont été volés dans les archives et revendus en occident à des collectionneurs privés...
Dessin de Chernikhov pour l'usine "Le Cloutier rouge"
La production de spiral continue à Saint-Peterbourg, comme vous avez pu le voir dans le reportage que Svoboda a posté ici: https://www.montres-russes.org/t5487-reportage-rts-1-sur-raketa
Dernière édition par Hanoi le Ven 17 Juin 2016 - 10:33, édité 2 fois
Hanoi- Expert
- Messages : 3645
Date d'inscription : 20/03/2015
Age : 61
Localisation : Bruxelles
Re: Spiral et Cloutier rouge
Hanoï pour cet article une fois encore très documenté
Je ne te cache pas qu'il pourrait presque remettre en cause certaines affirmations sur Vostok qui énoncent que - pour les montres Pobeda produites par elle à partir de 1946 - la manufacture maîtrise l'ensemble de sa production horlogère sans apport d'aucune pièce extérieure dès 1949.
Il est indiqué, par ailleurs, qu'entre 1946 et 1949, la manufacture de Tchistopol assemble des pièces provenant de la manufacture de Penza /Пенза.
Alors que ton article mentionne que jusqu'en 1955, le spiral de presque toutes les montres soviétiques était fabriqué par la société suédoise Sandvik
Ah les infos contradictoires (enfin ici presque contradictoire) sur les montres soviétiques ... c'est le sel même de
Je ne te cache pas qu'il pourrait presque remettre en cause certaines affirmations sur Vostok qui énoncent que - pour les montres Pobeda produites par elle à partir de 1946 - la manufacture maîtrise l'ensemble de sa production horlogère sans apport d'aucune pièce extérieure dès 1949.
Il est indiqué, par ailleurs, qu'entre 1946 et 1949, la manufacture de Tchistopol assemble des pièces provenant de la manufacture de Penza /Пенза.
Alors que ton article mentionne que jusqu'en 1955, le spiral de presque toutes les montres soviétiques était fabriqué par la société suédoise Sandvik
Ah les infos contradictoires (enfin ici presque contradictoire) sur les montres soviétiques ... c'est le sel même de
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VintageVostokodépendant
Jurmala 1988- Administrateurs
- Messages : 3726
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Re: Spiral et Cloutier rouge
Ah oui c'est contradictoire.
Il semble que l'URSS n'importait pas seulement des spiral sandvik mais aussi d'autres ressorts pour montres de précisions.
Pour ces autres ressorts, il y a eu en parallèle production (de qualité ordinaire) et importation (de qualité supérieure).
Peut-être est-ce le cas du spiral: produit localement en 49 mais d'une qualité nécessitant encore des importations jusqu'en 55 pour les montres de précision?
Je retourne à mes recherches!
Il semble que l'URSS n'importait pas seulement des spiral sandvik mais aussi d'autres ressorts pour montres de précisions.
Pour ces autres ressorts, il y a eu en parallèle production (de qualité ordinaire) et importation (de qualité supérieure).
Peut-être est-ce le cas du spiral: produit localement en 49 mais d'une qualité nécessitant encore des importations jusqu'en 55 pour les montres de précision?
Je retourne à mes recherches!
Hanoi- Expert
- Messages : 3645
Date d'inscription : 20/03/2015
Age : 61
Localisation : Bruxelles
Re: Spiral et Cloutier rouge
Merci pour cette étude. J'apprends plein de choses sur ce forum (ça compense l'argent qu'il me fait dépenser).
Et je découvre les dessins de Chernikov, très dans l'air de l'époque. Futurisme, constructivisme, on sent bien un courant planétaire malgré des adaptations locales (et autres récupérations).
Et accessoirement, le travail des ombres et volumes me rappelle certains albums de Judge Dredd
Et je découvre les dessins de Chernikov, très dans l'air de l'époque. Futurisme, constructivisme, on sent bien un courant planétaire malgré des adaptations locales (et autres récupérations).
Et accessoirement, le travail des ombres et volumes me rappelle certains albums de Judge Dredd
Horsault- Commissaire politique
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