1930: Le déménagement à Moscou des fabriques Dueber-Hampden et Ansonia Clock
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1930: Le déménagement à Moscou des fabriques Dueber-Hampden et Ansonia Clock
Nous avons vu que la mission soviétique aux USA décida finalement d'acheter deux fabriques horlogères américaines en faillite: Dueber-Hampden et Ansonia Clock Co (voir ici). Cela me permettra de terminer ma série d'articles consacrée à la période préindustrielle de l'horlogerie soviétique, puisque nous allons parler de l'arrivée, à Moscou, des moyens de l'industrialisation...
Un mot sur ces deux fabriques pour commencer:
La Dueber-Hampden Watch Company est née en 1923 de la fusion de deux sociétés distinctes: la Dueber Watch Case Company et la Hampden Watch Company. En 1886, John Dueber, propriétaire de la Dueber Watch Case Company, avait acheté une participation majoritaire dans la Hampden Watch Company. En 1888, il déménagea la Hampden Watch Company de Springfield, Massachusetts et la Dueber Watch Case Company de Newport (Kentucky) à Canton (Ohio). Ces deux sociétés partageaient des installations de fabrication à Canton mais restaient deux sociétés distinctes jusqu'à la fusion. La Dueber Watch Case Company fournisait des boîtiers à la Hampden Watch Company, qui fabriquait des mécanismes et assuraient le montage final. La Dueber Watch Case Company et la Hampden Watch Company sont rapidement devenues deux des plus gros employeurs de Canton. En 1927, la société a fait faillite et a finalement cessé toute activité en 1930. Ses équipements allaient servir de base à la 1ère Fabrique de Montres d'Etat de Moscou.

Les usines Dueber-Hampden à Canton (Ohio)

Catalogue Dueber-Hampden (1927)
L'histoire d'Ansonia Clock remonte en 1844, lorsque le marchand de métaux Anson Greene Phelps fonda la société Ansonia Brass, à Ansonia, pour approvisionner en laiton l'industrie d'horlogère en expansion dans le Connecticut. En 1850, l'Ansonia Clock Company a été créée en tant que filiale de l'Ansonia Brass Company. En 1877, la société achète une usine à New York et y a transféré la majeure partie de sa production horlogère. En 1879, une deuxième usine a été ouverte à Brooklyn. La société Ansonia Clock, prospère. En 1914, Ansonia produisait 440 modèles différents d'horloges et de réveils. Mais les difficultés commencent dans les années '20 et la société est en faillite en 1927. Ses équipements allaient servir de base à la 2e Fabrique de Montres d'Etat de Moscou.

Un réveil de l'Ansonia Clock
C'est via l'Amtorg, la société créée à New)York par la Russie soviétique pour l'import-export avec les USA, que l'URSS a acheté les modèles, les machines, les outils et les stocks des deux fabriques. En ce qui concerne Dueber-Hampden, deux contrats ont été signés le 26 avril 1929. Le premier, de 325,000$, était pour les machines et le second, de 125,000$, était pour les stocks de pièces et de mécanismes. Le commissaire en chef d'Amtorg pour l'achat de l'usine de Dueber-Hampden était M.A .Vladiminsky (il deviendra le premier directeur de la 1ère Fabrique de Moscou).
Trois spécialistes soviétiques se sont rendus à Canton pour aider à emballer et à étiqueter les caisses. Samuel Zoubkov, horloger de métier, et deux membres de la commission Alexander Breïtbourt (qui deviendra l'ingénieur en chef de la 1ère Fabrique de Moscou) et Percy Dreyer (qui rentra avec la mission en Europe mais qui s'arrêta à Berlin). En avril 1930, un cargo embarquant l'équipement Dueber-Hampden apareillait pour l'URSS. Vingt-huit wagons de marchandises remplis de machines et de pièces ont été transportés de Canton à Moscou.
Vingt-trois anciens travailleurs spécialisés de Dueber-Hampden, dont une femmes, qui avaient perdu leur emploi lors de la mise en liquidation de l'entreprise, ont été réembauchés, sur un contrat d'un an, pour aider à former les ouvriers soviétiques. Ils quittèrent Canton le 25 février 1930 et passèrent plusieurs jours à New York avant d'embarquer sur l'Aquitania le 1er mars. Le voyage en mer de huit jours, agité, s'est terminé en Cherbourg. De là, le groupe a pris le train pour Moscou via Varsovie, Berlin et Paris. A son arrivée, le 16 mars 1930, il fut accueilli par une grande manifestation de foule. Ils ont d'abord été amenés à leur logement (une ancienne demeure aristocratique avec baignoire en marbre, où était affecté un cuisinier et un employé de maison).
Le 18 mars, un banquet en leur honneur était donné au Grand Hôtel avec un orchestre jouant des airs américains. En attendant que la fabrique soit achevée (les machines et fournitures achetées n'avaient même pas encore quitté les USA), ils profitèrent de visites, organisées pour eux, à Moscou, comprenant celle du Kremlin.

L'Aquitania appartenait à la célèbre compagnie Cunard, la White Star

Le Grand Hôtel (un cliché du grand photographe soviétique des années '30, Mikhaïl Prekhner)
Tous les Américains ont indiqué qu'ils étaient bien traités pendant leur année en URSS. Toutes leurs dépenses étaient couvertes. Ils étaient payés même lorsqu'ils étaient trop malades pour travailler et hospitalisés gratuitement, traitement dont ils ne bénéficiaient pas aux USA. Chaque travailleur aurait été payé environ 4.650 $ (66.000 $ aujourd'hui) plus 300 $ pour couvrir les frais.
Les spécialistes de Dueber-Hampden ont été très impressionné par la vitesse d'apprentissage des ouvriers soviétiques, en particulier les femmes. Après l'anglais, l'allemand était le plus courant langue utilisée entre les travailleurs américains et russes. Il est intéressant de noter que le Nord Canton, à proximité du site de l'usine de Dueber-Hampden, s'appelait New Berlin jusqu'en 1918 et avait été principalement colonisée par des immigrants allemands.
Les Soviétiques proposèrent aux ouvriers américains de prolonger d'un an leur contrat – mais aux salaires soviétiques et tous finirent par retourner aux USA.

La carte d'identité soviétique d'un des spécialistes de Dueber-Hampden : William Goodenberger. Elle est tamponnée et contresignée par le Gostrust Tochmekh

Un des spécialistes de Dueber-Hampden, John Miller (assis) instruisant des ouvriers soviétiques dans les locaux de la 1ère Fabrique.
Source principale : Le site d'Alan F. Garratt, voir ici

Un mot sur ces deux fabriques pour commencer:
La Dueber-Hampden Watch Company est née en 1923 de la fusion de deux sociétés distinctes: la Dueber Watch Case Company et la Hampden Watch Company. En 1886, John Dueber, propriétaire de la Dueber Watch Case Company, avait acheté une participation majoritaire dans la Hampden Watch Company. En 1888, il déménagea la Hampden Watch Company de Springfield, Massachusetts et la Dueber Watch Case Company de Newport (Kentucky) à Canton (Ohio). Ces deux sociétés partageaient des installations de fabrication à Canton mais restaient deux sociétés distinctes jusqu'à la fusion. La Dueber Watch Case Company fournisait des boîtiers à la Hampden Watch Company, qui fabriquait des mécanismes et assuraient le montage final. La Dueber Watch Case Company et la Hampden Watch Company sont rapidement devenues deux des plus gros employeurs de Canton. En 1927, la société a fait faillite et a finalement cessé toute activité en 1930. Ses équipements allaient servir de base à la 1ère Fabrique de Montres d'Etat de Moscou.

Les usines Dueber-Hampden à Canton (Ohio)

Catalogue Dueber-Hampden (1927)
L'histoire d'Ansonia Clock remonte en 1844, lorsque le marchand de métaux Anson Greene Phelps fonda la société Ansonia Brass, à Ansonia, pour approvisionner en laiton l'industrie d'horlogère en expansion dans le Connecticut. En 1850, l'Ansonia Clock Company a été créée en tant que filiale de l'Ansonia Brass Company. En 1877, la société achète une usine à New York et y a transféré la majeure partie de sa production horlogère. En 1879, une deuxième usine a été ouverte à Brooklyn. La société Ansonia Clock, prospère. En 1914, Ansonia produisait 440 modèles différents d'horloges et de réveils. Mais les difficultés commencent dans les années '20 et la société est en faillite en 1927. Ses équipements allaient servir de base à la 2e Fabrique de Montres d'Etat de Moscou.

Un réveil de l'Ansonia Clock
C'est via l'Amtorg, la société créée à New)York par la Russie soviétique pour l'import-export avec les USA, que l'URSS a acheté les modèles, les machines, les outils et les stocks des deux fabriques. En ce qui concerne Dueber-Hampden, deux contrats ont été signés le 26 avril 1929. Le premier, de 325,000$, était pour les machines et le second, de 125,000$, était pour les stocks de pièces et de mécanismes. Le commissaire en chef d'Amtorg pour l'achat de l'usine de Dueber-Hampden était M.A .Vladiminsky (il deviendra le premier directeur de la 1ère Fabrique de Moscou).
Trois spécialistes soviétiques se sont rendus à Canton pour aider à emballer et à étiqueter les caisses. Samuel Zoubkov, horloger de métier, et deux membres de la commission Alexander Breïtbourt (qui deviendra l'ingénieur en chef de la 1ère Fabrique de Moscou) et Percy Dreyer (qui rentra avec la mission en Europe mais qui s'arrêta à Berlin). En avril 1930, un cargo embarquant l'équipement Dueber-Hampden apareillait pour l'URSS. Vingt-huit wagons de marchandises remplis de machines et de pièces ont été transportés de Canton à Moscou.
Vingt-trois anciens travailleurs spécialisés de Dueber-Hampden, dont une femmes, qui avaient perdu leur emploi lors de la mise en liquidation de l'entreprise, ont été réembauchés, sur un contrat d'un an, pour aider à former les ouvriers soviétiques. Ils quittèrent Canton le 25 février 1930 et passèrent plusieurs jours à New York avant d'embarquer sur l'Aquitania le 1er mars. Le voyage en mer de huit jours, agité, s'est terminé en Cherbourg. De là, le groupe a pris le train pour Moscou via Varsovie, Berlin et Paris. A son arrivée, le 16 mars 1930, il fut accueilli par une grande manifestation de foule. Ils ont d'abord été amenés à leur logement (une ancienne demeure aristocratique avec baignoire en marbre, où était affecté un cuisinier et un employé de maison).
Le 18 mars, un banquet en leur honneur était donné au Grand Hôtel avec un orchestre jouant des airs américains. En attendant que la fabrique soit achevée (les machines et fournitures achetées n'avaient même pas encore quitté les USA), ils profitèrent de visites, organisées pour eux, à Moscou, comprenant celle du Kremlin.

L'Aquitania appartenait à la célèbre compagnie Cunard, la White Star

Le Grand Hôtel (un cliché du grand photographe soviétique des années '30, Mikhaïl Prekhner)
Tous les Américains ont indiqué qu'ils étaient bien traités pendant leur année en URSS. Toutes leurs dépenses étaient couvertes. Ils étaient payés même lorsqu'ils étaient trop malades pour travailler et hospitalisés gratuitement, traitement dont ils ne bénéficiaient pas aux USA. Chaque travailleur aurait été payé environ 4.650 $ (66.000 $ aujourd'hui) plus 300 $ pour couvrir les frais.
Les spécialistes de Dueber-Hampden ont été très impressionné par la vitesse d'apprentissage des ouvriers soviétiques, en particulier les femmes. Après l'anglais, l'allemand était le plus courant langue utilisée entre les travailleurs américains et russes. Il est intéressant de noter que le Nord Canton, à proximité du site de l'usine de Dueber-Hampden, s'appelait New Berlin jusqu'en 1918 et avait été principalement colonisée par des immigrants allemands.
Les Soviétiques proposèrent aux ouvriers américains de prolonger d'un an leur contrat – mais aux salaires soviétiques et tous finirent par retourner aux USA.

La carte d'identité soviétique d'un des spécialistes de Dueber-Hampden : William Goodenberger. Elle est tamponnée et contresignée par le Gostrust Tochmekh

Un des spécialistes de Dueber-Hampden, John Miller (assis) instruisant des ouvriers soviétiques dans les locaux de la 1ère Fabrique.
Source principale : Le site d'Alan F. Garratt, voir ici

Hanoi- Expert
- Messages : 3571
Date d'inscription : 20/03/2015
Age : 60
Localisation : Bruxelles
Re: 1930: Le déménagement à Moscou des fabriques Dueber-Hampden et Ansonia Clock
Excellente article, j'avais épluché la référence lors de la dernière recherche.
Un point intéressant aussi, j'ai lu que certain anglo-saxons tendaient à cité Dueber-Hampden Watch Company comme l'authentique créateur de l'horlogerie Russe, en général ces revues et articles ne citent que peu à pas Lip.
Un point intéressant aussi, j'ai lu que certain anglo-saxons tendaient à cité Dueber-Hampden Watch Company comme l'authentique créateur de l'horlogerie Russe, en général ces revues et articles ne citent que peu à pas Lip.
YanKristian- Administrateurs
- Messages : 1489
Date d'inscription : 06/08/2017
Re: 1930: Le déménagement à Moscou des fabriques Dueber-Hampden et Ansonia Clock
A leur décharge, LIP n'est intervenue que dans un second temps, alors que les deux premières fabriques de montres de Moscou étaient pleinement opérationnelles.
Hanoi- Expert
- Messages : 3571
Date d'inscription : 20/03/2015
Age : 60
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